Le sexe du chômage : des femmes et filles premières victimes de la sextorsion jusqu’à  69.1 % selon une  enquête de l’AFEM au Sud-Kivu
Cette enquête de l’association des femmes des médias, AFEM signale que sur 320 femmes interrogées sur la sextorsion, 221 cas soit 69,1% ont été victime de cette violation des droits humains. Pour cette association, cette nouvelle forme des violences basées sur le genre est considérée comme une corruption liée au sexe, qui remplace l’argent. Pour beaucoup d’observateurs, cette pratique est la source du chômage des femmes et filles, d’analphabétisme, d’humiliation et bien d’autres conséquences. Et cela en dépit des lois nationales et internationales qui sanctionnent cette pratique.
Selon la chercheure principale, Georgette NKUNZI, du bureau de recherche de l’AFEM qui a mené cette enquête, indique que la sextorsion est une combinaison des mots « sexe » et « extorsion ». Il désigne une forme de corruption où le sexe, plutôt que de l’argent ou du bien, est utilisé comme monnaie d’échange pour des services ou des faveurs, ou pour éviter des sanctions.
Des victimes de la sextorsion relatent leurs calvaires
Difficile pour beaucoup de femmes et filles victimes de dénoncer souvent leurs bourreaux soit à cause des pesanteurs culturels, l’impunité, la peur et la banalisation par certains de la question des droits de la femme.
Cependant, une femme qui a gardé l’anonymat a partagé son expérience : « Non ! C’est inhumain ! J’avais postulé pour un emploi dans une organisation, mais le recruteur m’a demandé de coucher avec lui en échange du poste malgré mes compétences. Alors, j’ai refusé et voilà pourquoi, je suis encore en chômage »
Une fille licenciée, orpheline des parents, larmes aux yeux témoigne : « Après la mort de mes parents, j’étais obligé de me battre davantage pour trouver l’emploi afin de subvenir à mes besoins et ceux de mes deux frères. C’est alors qu’un jour je postule, retenue puis la dernière étape le recruteur m’oblige de coucher avec lui pour décrocher cet emploi. J’ai accepté, mais après des années, j’ai appris qu’il avait le virus du vih/sida. Et voilà cet emploi qui me tue alors. J’aurai dit accepter de rester dans le chômage à cause de mon sexe.»
« Moi, j’ai dit non à la sextorsion ! Mon corps m’appartient tout de même. A quoi ça sert alors les études d’une fille, d’une femme ; ses compétences et capacités si pour décrocher un emploi ou réussir ses études, elle doit donner son corps. Nous devons dire tous non à cette humiliation » s’insurge une enquêtée.
Prévalence élevée des cas de la sextorsion la province du sud kivu
Selon les résultats de cette étude d’AFEM montrent que 69,1 % des répondantes ont subi des actes de sextorsion, indiquant une forte occurrence de cette forme de corruption dans la province du Sud-Kivu.
Par ailleurs, la même étude signale que les jeunes femmes, en particulier celles âgées de 20 à 30 ans, sont les plus vulnérables, souvent ciblées par des personnes en position d’autorité telles que des enseignants, employeurs ou fonctionnaires locaux.
L’équipe de recherche conduite par Georgette NKUNZI fait savoir que cette enquête (communiquée en 2024) a été réalisée en milieu scolaire, universitaire et professionnel dans la province du Sud-Kivu à l’est de la République démocratique du Congo, RDC.
« Au total, 320 femmes et filles âgées de 11 à 63 ans ont participé à l’étude, dont jeunes élèves ( 8,1 %), 32 étudiants ( 10%) et 261 femmes travaillant dans les secteurs suivants : secteur public ( 14,1%), secteur privé ( 11,6%), secteur minier (27,2%), commerçantes ( transfrontalières ( 3,1%), médias ( femmes journalistes) ( 9,7%), école ( enseignantes) ( 8,1%) et entrepreneuses ( 8,1%) ont été interviewées » précise Georgette NKUNZI
Manifestations de la sextorsion dans les milieux selon les enquêtées
Dans les écoles et universités, la sextorsion se manifeste souvent par des sanctions injustes, des mauvaises notes et des avances sexuelles. Les enseignants ou administrateurs peuvent exiger des faveurs sexuelles en échange des notes ou d’autres avantages académiques, exploitant leur position de pouvoir sur les étudiants.
Et dans les milieux professionnels, les femmes, tant dans le secteur public que privé ont signalé être soumises à des propositions sexuelles, du chantage et d’autres formes d’exploitation par des supérieurs ou des collègues.
Et dans les secteurs miniers et du commerce informel : les femmes travaillant dans ces secteurs ont décrit être poussées à entrer dans des relations sexuelles comme condition d’accès aux opportunités de travail ou à la protection.
Différents acteurs s’engagent dans la lutte pour mettre fin à la sextorsion
Après la présentation de ce résultat au niveau national que provincial, différents acteurs estiment qu’il est temps que chaque personne selon son pouvoir d’autorité s’active dans la lutte contre ce fléau.
Des professionnels des médias au sortir d’un atelier organisé à leur intention, choqués se disent prêts à sensibiliser les communautés, les autorités sur la nécessite d’une lutte commune pour mettre fin à cette violation des droits de la femme et fille.
« Je veux organiser des émissions débats afin de montrer des conséquences de cette pratique sur la santé des femmes et filles, sur leur épanouissement professionnel et psychologique,… » confie Louise BUSANE, de la radio Svein
De son côté, la cheffe de division provinciale du genre, femme, famille et enfant, Jacqueline NGENGELE vexée par cette pratique qu’elle qualifie humiliante, dégradante invite toutes les couches de la population à dénoncer tout cas de sextorsion afin que la justice s’occupe des auteurs.
Et pour part, le député provincial Didier KATEMBERA dit savoir en tant qu’un élu du peuple, il reste préoccupé par la vie et le respect des droits des citoyens. Il condamne la sextorsion sous toutes ses formes. Par ailleurs, il dit être prêt à endosser un projet d’édit qui condamne cette pratique.
Pour sa part, maître Yvette KABWENE, rappelle que la loi congolaise sanctionne tout cas de violation des droits de l’homme. Il cite notamment les lois sur les violences sexuelles : Loi N°06/018 du 20 Juillet 2006 modifiant et complétant le décret du 30 Janvier 1940 portant code pénal Congolais.
Par ailleurs, il indique aussi que la loi N°06/019 du 20 Juillet 2006 modifiant et complétant le décret du 06 Août 1959 portant code de procédure pénale Congolais.
De son côté, Arsène CHIFINDA, activiste des droits de l’Homme rappelle que la convention sur l’élimination de toutes formes des violences à l’égard de la femme, ou encore la déclaration universelle des droits de l’homme condamne cette forme de violation des droits de l’homme, qui est cette extorsion. Il promet de sensibiliser son entourage sur le danger de la sextorsion au développement d’une entité.
Deo CIKURU
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