RDC : « Il faut continuer à briser le système d’impunité des violences sexuelles », selon le Canada et le PNUD
EXLUSIF MAMA Radio :
Cette pratique des violences sexuelles est combattue de toutes parts. Une guerre sans merci est menée, non seulement, par la société civile et le gouvernement, mais aussi des partenaires extérieurs qui ne jurent qu’au nom de la promotion de l’égalité des sexes et de l’élimination des violences sous toutes leurs formes. Dans les provinces du nord et du sud Kivu, les femmes et les filles en sont victimes. Et le tableau est encore relativement sombre, nonobstant les efforts qui se poursuivent pour bloquer cette hémorragie. Priya Gajraj, directeur pays du PNUD apporte un éclairage sur six questions que se poseraient des observateurs curieux. C’est, en l’occasion, de la visite de la ministre du Canada ayant dans ses attributions le développement International et de la Francophonie, Marie-Claude Bibeau la semaine dernière à Goma, au centre communautaire polyvalent de Buholo/Mugunga dans le cadre du programme TUPINGE UBAKAJI.
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- Mama Radio : Quelles sont les raisons fondamentales de combattre, avec vigueur, les violences sexuelles et celles basées sur le genre en RDC d’âpres vous ?
Le PNUD et le Canada sont d’avis que la violence contre les femmes viole et annule les droits des femmes et des filles. Il fait obstacle à la réalisation des objectifs d’égalité, de développement, de prospérité et de sécurité.
La question à nous poser est de savoir d’où venons-nous ?
Dans moins d’une décennie, le recours à la violence contre les femmes et au viol est utilisé comme une véritable tactique et arme de guerre, pouvant être considéré ainsi comme un crime de guerre, tel que cité dans la Résolution 1820 des Nations Unies sur l’usage de la violence sexuelle comme stratégie de guerre et menace à la paix et à la sécurité internationales, adoptée en 2008.
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- Mama Radio : Pourquoi de nombreux cas flagrants des violences à l’égard des femmes passent sous silence ?
Comme on le sait, en RDC, les violences sexuelles et basées sur le genre ont été perpétrées aussi bien par des militaires que par la population civile, et passées sous le silence complice et collectif des victimes. Cette situation a engendré l’impunité. Chose qui a permis de cautionner l’oubli.
L’impunité et le silence des institutions judicaires ont fait des filles et femmes des cibles réellement vulnérables ou perçues comme telles. En conséquence, elles deviennent les principales victimes marginalisées de la société.
Le phénomène était choquant dans les provinces de l’Est de la République Démocratique du Congo (RDC). Les données collectées de 2009 à 2012 confirment l’ampleur de l’impunité en ce sens : 15.054 cas de violences basées sur le sexe au Nord Kivu, 6 .560 cas au Sud Kivu et 1.069 cas en Ituri.
- Mama Radio : Face à cette impunité quasi généralisée en matière des crimes sexuels et sexistes, quels résultats, retient-on, de l’appui du canada en ce sens au pays ?
L’appui du Canada a contribué à la lutte contre l’impunité, à prévenir et à protéger contre les violences sexuelles, à intégrer cette lutte dans la réforme du secteur de la sécurité en améliorant l’accès des victimes à l’aide et aux services juridiques en RDC.
En particulier, en RDC, l’appui du Canada a permis de :
- briser le système d’impunité qui était presque institutionnalisé et la culture de silence qui existe autour de la violence basée sur le genre
- appuyer les filles et les femmes à rompre le cycle de la violence et à contester l’impunité qui entoure les violations de leurs droits ou de toute personne en quête de guérison et de justice
- aider les femmes et les filles à s’autonomiser économiquement, à améliorer leurs conditions de vie et à les rendre capables de retrouver le respect et l’estime de soi en s’attaquant à la pauvreté et à la stigmatisation,
- sensibiliser les institutions judiciaires, étatiques et la communauté à s’engager dans la lutte contre l’impunité des auteurs de violences sexuelles
- Mama Radio : Quels sont les défis sur lesquels devra, dans l’avenir, se focaliser l’attention collective pour promouvoir cette égalité des genres ?
- Les barrières sociales et culturelles à l’égalité des sexes : les pratiques dominantes et les comportements incarnés dans les normes sociales et culturelles posent de sérieux défis pour l’atteinte de l’objectif qui est l’égalité des sexes et l’autonomisation des femmes.
- Le défi n’est pas simplement l’amélioration du cadre légal existant, mais aussi de s’assurer que les normes soient acceptées, intégrées dans les lois et pleinement mises en Å“uvre.
- L’insécurité dans certaines zones d’intervention.
- L’accès difficile aux offres de services pour les victimes de VSBG dans les zones enclavées et/ou éloignées.
- La problématique de la réparation (indemnisation) des victimes de violences sexuelles.
- Mama Radio : Qu’en est-il des structures qui permettent de renforcer cette égalité pour un véritable changement d’attitudes et comportements rétrogrades à l’endroit des femmes au sein de la communauté ?
Deux éléments sont à noter, notamment :
- L’appui à l’opérationnalisation des cadres de concertation territoriale, provinciale ou nationale dans le domaine de la lutte contre les violences basées sur le genre,
- Le renforcement de la présence des femmes dans les instances de prise des décisions ainsi que leur représentation active et concrète aux activités du processus de paix et de sécurité.
Dans cet ordre d’idées, il est nécessaire de soutenir les organisations de défense des droits de la femme à influencer les réformes politiques et leur mise en œuvre et à transformer les normes sexo-spécifiques. Et ensuite, à favoriser le changement d’attitudes, des comportements stéréotypés et autres normes sociales en investissant dans des programmes y relatifs à long terme.
A signaler aussi ce souci de raffermir les capacités des institutions comme le pouvoir judiciaire et la police, à mettre en route les politiques et programmes qui traitent de la violence domestique.
- Mama Radio : Quelles sont les perspectives d’avenir pour que ce programme TUPINGE UBAKAJI soit concrètement efficace ?
Comme le Canada, le PNUD est d’avis qu’une approche axée sur les droits de la personne est importante pour le Programme de développement à l’horizon 2030.
Et ce, dans le sens de favoriser le processus de paix et lutter contre la violence sexiste à travers les points suivants :
- La mise en œuvre concrète de la résolution 1325 du conseil de sécurité des nations unies (2000) sur les femmes, la paix et la sécurité,
- La protection des droits des femmes et des filles en cherchant à assurer leur sécurité, leur assistance médicale et juridique, leur sécurité économique. Dans ce cas, le Programme de lutte contre l’impunité et les VSBG, appuyé par le Canada en RDC et l’institutionnalisation des « One- Stop Centers » sont des exemples encourageants,
- Le renforcement de la capacité interne du gouvernement à coordonner et à rendre compte des résultats en matière d’égalité des sexes (y inclus la mise en Å“uvre de la Stratégie Nationale de Communication pour le changement de comportement en matière de genre),
- Le renforcement de la capacité des institutions comme le pouvoir judiciaire et la police, à mettre en œuvre les politiques et les programmes qui traitent de la violence domestique.
Voilà donc des explications qui démontrent la détermination du PNUD et du Canada à booster sensiblement la lutte contre les violences faites aux femmes à l’Est de la RDC.
                                                                                                                              Jean Paul BADIBANGA
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