Sud-Kivu : Des femmes obtiennent difficilement des promotions dans des partis politiques
La faible représentation des femmes aux postes de prise de décisions reste un défi majeur à relever en République Démocratique du Congo. A Bukavu, dans la province du Sud-Kivu, des femmes sont majoritaires dans les partis politiques. Mais elles restent largement minoritaires dans les organes de direction des partis. Ce qui constitue un obstacle lorsqu’il faut recommander des cadres pour occuper des postes importants dans l’administration ou au gouvernement.
« C’est pratiquement 4 ans que je fais partie de ce parti politique. Je suis cadre du parti mais je n’ai pas de poste. Je garde mon mal en patience peut-être un jour je serai aussi présidente fédérale. J Je suis déterminée à aller de l’avant. Je suis une femme battante, j’ai des atouts… »,explique une militante d’un parti politique de la place.
A Bukavu, certaines de femmes militantes au sein de certains partis politiques ne sont pas promues pourtant compétentes. Diplômées, actives mais celles ci restent généralement dans l’ombre. Et celles qui obtiennent des postes sont souvent nommées à la “ligue de femmes”, un organe créé pour encadrer des femmes des partis politiques.
C’est le cas de cette autre femme, militante au sein d’un autre parti politique présent à Bukavu. Elle pense que les femmes ne doivent pas rester militante sans promotion car elles ont des compétences.
« Si non je risque de rester militante sans avenir au sein dudit parti politique. Ils nous contactent toujours à la dernière minute quand il faut déposer la liste de candidats. C’est à ce moment-là que vous allez voir les noms de certaines femmes qui ne sont pas connues d’avance et qui n’ont rien pour se faire connaître car elles ne s’y attendaient pas… », explique cette autre dame.
Pas que militantes
Des femmes qui accèdent au poste de président fédéral dans leurs formations politiques, y accèdent souvent pour faire l’intérim lorsqu’il y a vacance à ce poste. C’est le de Adeline Munyerenkana, présidente fédérale ai du parti politique Avenir du Congo. Pour elle, des femmes compétentes sont nombreuses à l’attente des promotions au sein de partis politiques. Il est juste question d’être soutenu pour accéder aux postes décisionnels dans les partis politiques.
« J’ai adhéré dans ce parti politique il y a 4ans. Cela parce que j’ai toujours eu des ambitions politiques. J’ai commencé militante comme les autres. Il y a une année depuis que j’ai été nommée présidente fédérale ad intérim jusqu’à ce jour. Je fais l’intérim parce que des hommes membres de mon parti ont vu que j’ai des atouts et que je suis capable. Lors des élections législatives passées, vous m’avez vu battre campagne avec mon bébé dans le ventre ! J’ai échoué, mais ça ne me décourage pas toujours. Aujourd’hui je suis présidente fédérale ai et je sais que je peux devenir présidente titulaire demain parce que j’ai des compétences. Je sais qu’il y a des femmes qui sont comme moi avec des ambitions politiques. Il suffit qu’elles se retrouvent avec des hommes qui acceptent leurs compétences pour aller de l’avant.
« Nous sommes fortes et compétentes. Il suffit d’accentuer des initiatives qui permettent aux femmes de participer pleinement à toutes les structures internes d’élaboration des politiques et aux processus de présentation de candidature à des postes électifs et autres. Aussi, envisager d’incorporer la problématique hommes-femmes dans leur programme politique et veiller à ce que les femmes participent au même titre que les hommes à la direction des partis politiques », fait savoir Munyerenkana.
Pour Solange Lwashiga, porte-parole nationale du mouvement « Rien sans les femmes », les femmes ont montré depuis longtemps qu’elles sont capables d’être des chefs aussi bien dans des organisations communautaires et informelles que dans des fonctions publiques. Mais pour elle, la place reconnue à la femme et à l’homme dans la société et les stéréotypes véhiculés par certaines personnes, renforcent la tendance à réserver aux hommes le pouvoir et les responsabilités politiques. Les femmes n’étant exploitées que pour gonfler le nombre des militants, danser et chanter pour les autorités publiques ou des partis politiques.
« Nous savons tous qu’il y a des femmes compétentes au sein des partis politiques. Les femmes ont adhéré massivement dans ces partis politiques. Elles sont là et compétentes mais elles ne sont pas promues. Elles militent jour et nuit pour être nommées comme présidentes fédérales mais souvent elles sont coincées par certains hommes. Les postes sont devenus stratégiques de façon que l’idée de promouvoir la femme est resté une théorie », fait savoir Solange.
Elle ajoute qu’il y a des femmes compétentes partout dans des partis politiques comme au sein des entreprises publiques. Pour Lwashiga, il suffit juste de compter sur elles sans hypocrisie et elles joueront pleinement leurs rôles mieux que certains hommes.
« Le fait que la femme est sous-représentée aux postes de responsabilité au sein des partis politiques, l’empêche de jouer pleinement son rôle important dans de nombreuses institutions clefs où les personnes sont nommées sur recommandations des partis politiques. Certaines d’entre elles qui ont été nommées continuent à montrer que c’était un super choix de compter sur elles malgré des attitudes et pratiques discriminatoires dont elles sont victimes et les responsabilités familiales et maternelles », a-t-elle indiqué.
Il faut un engagement politique
Homer Bulakali, député provincial au Sud-Kivu fait savoir que l’implication des femmes dans les instances de prise de décision est une option politique stratégique pour contribuer au développement humain durable. L’inégalité dans la vie publique commence souvent dans des partis politiques qu’il faut chercher à éliminer par des mesures concrètes, martèle-t-il.
« Lorsque les femmes occupent des postes politiques et de responsabilités aux niveaux des gouvernements et des organes législatifs, elles exercent une influence qui amène à redéfinir les priorités politiques, à inscrire dans les programmes politiques de nouvelles questions qui reflètent leurs préoccupations spécifiques, leurs valeurs et leurs expériences, et à répondre à ces préoccupations et à éclairer d’un jour nouveau les questions politiques générales », explique le député provincial Bulakali.
Il indique que la répartition équitable du pouvoir et des responsabilités à tous les niveaux est du ressort du gouvernement et d’autres acteurs dont il fait partie. D’où l’espoir de relever ces différents défis auxquels les femmes font face pour accéder aux postes de décision à tous les niveaux, spécialement dans les entreprises publiques.
Maitre Adolphe Kilomba, avocat près la cour de Bukavu certifie que la femme a droit à une représentation équitable au sein des institutions nationales, provinciales et locales. “Les pouvoirs publics veillent à l’élimination de toute forme de discrimination à l’égard de la femme et assurent la protection et la promotion de ses droits” garantit l’article 14 de la constitution.
« La femme a droit de participer à la chose publique au même titre que l’homme. S’il y a des présidents fédéraux, il doit y avoir aussi les présidentes fédérales. Elle a droit aussi de créer son parti politique. Elle a droit aussi d’être élevée à des postes de décisions au sein de parti politique dans lequel elle est membre… », insiste Kilomba.
Cet article a été produit en collaboration avec Journalistes pour les droits humains, JDH/JHR avec l’appui d’Affaires mondiales Canada.
Rachel Rugarabura
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