RDC : Des élections jamais vues auparavant (Déclaration)
Les élections du 20 décembre 2023 ont été émaillées de beaucoup d’incidents en République Démocratique du Congo et particulièrement dans la province du Sud Kivu. Le Bureau de Coordination de la société civile du Sud Kivu qui le dit dans un point de presse, le samedi 23 décembre 2023 à Bukavu, évoque des ratés qui incombent à la responsabilité de la Commission Electorale Nationale Indépendante, aux risques de compromettre la crédibilité des résultats.
Lors de la présentation du rapport préliminaire du monitoring électoral des scrutins combinés, la société civile dit avoir documenté des irrégularités massives et des fraudes entretenues susceptibles d’écorner la fiabilité des scrutins et remettre en cause la sincérité des résultats qui en découleront.
C’est notamment du point de vue application de la loi et du calendrier électoraux violés par rapport au retard d’affichage des listes électorales, l’exclusion des témoins et observateurs à certains endroits à l’étape de compilation ainsi que leur accréditation tardive.
La violation des procédures de dépouillement par des agents de la CENI dénotant une formation bâclée dans plusieurs endroits, la violation de la loi par rapport à la poursuite de la campagne électorale et achat de voix le jour des votes, ainsi que le non affichage des résultats dans certains bureaux de vote ont aussi été documentés.
Outre cette situation, « la prolongation irrégulière des jours de vote, en violation de l’article 51 de la loi électorale, le refus de certains témoins et observateurs d’accéder dans des centres de vote, des violations du secret de vote par les accompagnateurs des personnes en difficulté d’utiliser les Dispositifs Electroniques de vote » ont été enregistrés, note le rapport de la société civile.
Du fait d’importants retards et dysfonctionnements, des bureaux de vote ont ouvert jeudi 21 et vendredi 22 décembre pour la poursuite des opérations de vote, sans aucune décision de la justice.
Le prolongement des jours du vote, est-il légal ?
La loi électorale permet-elle l’ouverture des bureaux de vote le lendemain de la date arrêtée dans le calendrier ? La réponse oscille entre le flou et la nuance. S’il est bien spécifié que l’ouverture des bureaux de vote peut déborder le jour d’après, et ce jusqu’à ce que le dernier électeur a glissé son bulletin dans l’urne, un bureau qui n’a pas ouvert à la date prévue dans le calendrier ne pourra jamais ouvrir, conformément à l’article 52 de la loi électorale.
Et malheureusement, le président de la CENI, Dénis Kadima, n’a dit aucune disposition légale qui l’autorise à organiser les élections un jour après, déplore la société civile. Des ratés dans l’organisation des élections ont fait à ce que les scrutins se tiennent deux ou trois jours de plus après la date officielle du 20 décembre, c’est-à-dire le 21 , le 22 et même le 23 décembre dans certains coins au Sud Kivu.
Selon toujours le rapport préliminaire de la société civile, des dysfonctionnements de certains DEV suite aux batteries non chargées ou confusion des clés USB où plusieurs DEV étaient préparés à l’ouverture en dehors des témoins et observateurs ont été recensés en plus d’autres cas de violation des libertés de choix où les électeurs étaient contraints à voter pour certains candidats qui n’étaient pas de leur choix.
La même source déplore également le déploiement tardif des kits électoraux, surtout en milieux ruraux, l’ouverture des bureaux de vote et de dépouillement sans que les listes des électeurs ne soient affichées, l’affichage tardif des listes définitifs des électeurs dans plusieurs centres de vote, mais aussi l’absence des listes des votants par dérogation.
Les élections générales : présidentielle, législatives nationales et provinciales, ainsi que locales en RDC ont aussi été émaillées de heurts dans des centres de vote où des balles réelles ont crépité et des scènes de bagarres signalés entre témoins des partis politiques et agents de la Ceni.
« Des kits électoraux ont été détournés à certains endroits, l’absence des listes des électeurs et des PV, la délocalisation de certains centres en milieux ruraux, la non publication des résultats dans certains centres de vote telle que la loi l’exige, voire la présence des militaires dans certains centres sont autant de scenarios qui piétinent les standards nationaux et internationaux d’une bonne élections », poursuit la déclaration lue par Adrien Zawadi, président du Bureau de coordination de la société civile du Sud Kivu.
Au regard de cette situation, la société civile demande à la Commission Electorale de publier les résultats conformes à la vérité des urnes et à la justice de trancher en toute transparence les contentieux électoraux.
Le parlement est également appelé à diligenter un audit par rapport à la passation des marchés effectuée par la CENI pour l’acquisition de ses biens et d’analyser ses recommandations par rapport à la poursuite en justice de l’entreprise MIRU system qui a fourni des kits d’enrôlement défectueux ayant préjudicié les congolais, à cause de la qualité détériorée des cartes d’électeurs.
Quelques avancées à saluer
Lors de ce point de presse, la société civile salue le respect du délai constitutionnel par la CENI pour l’organisation des élections et leur financement par le budget national congolais.
Outre cela, l’engouement massif des électeurs vers les centres de vote a aussi marqué un point positif pour la jeune démocratie congolaise, précise-t-elle.
Notre source renseigne que la présence de plusieurs observateurs internationaux provenant de la SADC, de l’Union Africaine, du Centre Carter et de l’Union Européenne, des témoins ainsi que des journalistes sont également à saluer.
Le vote des congolais vivant à l’étranger, ainsi que la tenue des élections municipales, après les dernières du genre datant de 1975 à l’époque du Zaïre, constituent d’autres notes positives, croit savoir la société civile.
La CENI répond à ses détracteurs
Dans une interview accordée à la presse à Kinshasa, le président de la Commission Electorale Nationale Indépendante rejette l’idée des élections chaotiques en RDC. Dénis Kadima soutient que son équipe a fait le meilleur d’elle-même pour offrir aux congolais ce droit de voter en dépit du temps imparti.
“J’ai entendu les gens parler d’élections chaotiques. Nous ne considérons pas ces élections comme étant chaotiques. Nous considérons le temps comme n’étant pas notre allié, nous avons fait le meilleur de nous-mêmes. Quel est le but. C’est de ne pas chercher la perfection pour être applaudi. Le but, c’est de permettre aux congolais et aux congolaises de participer à un processus ouvert et compétitif. Un processus démocratique, crédible et c’est ça notre plus grande préoccupation. Et quand nous avons étendu ce processus là au deuxième jour, c’est là aussi notre volonté d’assurer que les congolais jouissent de même droit, le droit d’égalité, le droit à la participation au vote”, a-t-il indiqué.
La CENI rejette donc les allégations des accusations dont elle fait l’objet au lendemain des élections combinées, indiquant que ce cycle électoral est une réussite au-dessus de la moyenne. “Donc pour nous, si certains voient un verre à moitié vide, nous nous voyons un verre au 3/4 rempli”, renchérit Dénis Kadima.
Rappelons que conformément au calendrier électoral, la proclamation des résultats provisoires est attendue au 31 décembre 2023, avant la publication des résultats officiels, le 10 janvier 2024, par la Cour Constitutionnelle.
Elysée Muzalia
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